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En route pour un nouveau voyage!!

 

13 heures de vol ?? Nan, c'est trop court. Je vais m'arranger pour que ça dure plutôt 48h!

 

 

Depuis le temps que je voyage, je commence à savoir que le premier trajet, celui qui vous emmène à votre destination de départ, est un des plus importants de tout le voyage. Il marque le début de l'aventure. Mais certains durent plus longtemps que d'autres (surtout que, jusqu'à présent, j'ai eu le chic pour les trajets en avion compliqués). Cette fois encore, j'ai gagné un voyage de 2 jours pour l'équivalent de 13 heures de vol... bon, c'est se compliquer la vie, c'est vrai, mais c'était moins cher alors... Du coup, me voici parti, jeudi à 6h40 de Toulouse, en bus, direction Barcelone, d'où partira mon premier avion. 5H de route plus tard, je suis dans la capitale catalane, tout content de reparler espagnol pour demander comment aller à l'aéroport. Quelques métros et trains après, j'arrive vers 13h à l'aéroport de Barcelone d'où partira mon premier vol en direction de Casablanca... dans 5 heures. Bon, heureusement le Wi-fi est illimité et gratuit donc j'en profite pour chercher des couchsurfings sur Buenos Aires.

 

Finalement l'heure du décollage arrive. Le vol, opéré par Royal Air Maroc, durera environ 1h30. Une fois dans l'avion, c'est ambiance locale et folklorique !! On se croirait au souk ! Les gens s'assoient au pif dans l'avion, chacun voulant être avec le cousin ou la cousine, et se voient évidemment délogés quelques secondes plus tard par le « propriétaire » du siège en question. S'ensuit alors un jeu des chaises musicales où chacun conteste, échange, voire marchande son siège :

 

-« Hey mon frère, je t'échange ma place 12F contre ta place 34E ok ? »

 -« Non, la mienne est contre un hublot et la tienne est entre deux places ! »

 -« OK, OK, pas problème, je te donne ma place ET mon dessert tout-à-l'heure !! »

-« … Ta place, ton dessert ET ton entrée et on a un deal »

-« OK, tope là !! »

 

En ce qui me concerne, étant naturellement intraitable en affaire, j'ai tout de suite eu accès à mon siège. Le vol se déroule sans incidence (incredibeul!) et j'arrive à Casablanca. Là, c'est l'épreuve du voyage : un transit aérien de 17 heures !! youpiii...

 

En sortant de l'avion, je me dirige vers la zone de transit international armé de mon sac de couchage, me préparant psychologiquement à passer une sale nuit assis sur un fauteuil, avec la clim à fond dans tout l'aéroport. J'aurai pu choisir de payer 70€ et aller à l'hôtel le plus proche mais je ne voulais pas dépenser d'argent (surtout autant) pour une nuit en transit, quitte à mal dormir... Et c'est le genre de choses pour lesquelles je peux être très têtu... Bref. En arrivant en zone de transit, des employés de l'aéroport contrôlent les billets et les passeports. L'un d'entre eux me dit que comme mon avion n'est que le lendemain, je dois passer les douanes et aller au « service hébergement ». Ah bon ? Là, je me souviens d'un écho que j'avais eu sur internet comme quoi au-dessus d'un certain temps d'attente, Royal Air Maroc logeait ses passagers. Je me prend à rêver.

 

Après avoir fait 1h de queue aux douanes (pas très organisés les types, 4 douaniers pour les 600 passagers des 3 avions qui viennent d'arriver) et demandé à tous les points d'infos rencontrés sur mon chemin, je trouve le service des hébergements de la compagnie qui m'annonce la merveilleuse nouvelle : Je suis transféré, nourri et logé dans un hôtel à proximité, le tout gratuitement !!! Mais c'est génial ça dit donc !! J'ai bien fait de ne pas réserver d'hôtel !! Suivant les instructions de l’hôtesse, je sors donc de l'aéroport devant lequel m'attend une navette pour l'hôtel ! Dans le mini-bus, je rencontre Karl (ce n'est pas son vrai nom, il me l'a dit mais c'est tellement imprononçable que je serais bien incapable de l'écrire. Du coup j'ai choisi de l'appeler Karl... c'est cool Karl...). Il est turc et voyage également en solo. Il était dans le même vol que moi et prend également l'avion pour São Paulo demain. Je le retrouverai au bar de l'hôtel (évidemment) après m'être installé dans ma superbe chambre pour moua tout seul !! Même pas arrivé et déjà une belle rencontre ! Et autour d'une dégustation de bières marocaines qui plus est !! Le parcours de Karl me laisse rêveur : près de 60 pays à son actif !!! Je fais moins le malin avec mes 20 petits pays là... Mais bon, pour ma défense, il a 38 ans... Cependant, tout comme moi, c'est la première fois qu'il se rend sur le continent sud-américain.

 

Après une bonne nuit de sommeil, une bonne douche et un bon petit déjeuner, je le retrouve dans la navette qui nous ramène à l'aéroport. A l'entrée, un contrôle des bagages. Je passe sans problème mais Karl, lui, sonne. L'agent de sécurité le scanne avec son espèce de raquette de ping-pong électronique qui clignote rouge de partout. Mais qu'est-ce qu'il trimbale pour affoler le radar comme ça ? Apparemment rien vu que l'homme de la sécurité le laisse passer sans plus de cérémonie. Bon, visiblement dans la sécurité les voyants rouges ça veut dire que tout est bon... Peut-être que les vert signalent un danger qui sait...

 Nous nous dirigeons vers le terminal 2 d'où part notre avion. Là, un autre contrôle génère une file d'attente. Arrivés au niveau du contrôleur, ce dernier ouvre nos passeports et jette un coup d’œil éclair dessus avant de nous les rendre et de nous laisser passer. Je me demande bien quelle info il cherchait... Nous débouchons donc, Karl et moi, sur une nouvelle file d'attente, plus grande, menant aux postes de sécurité pour vérifier que nous n'avons rien d'illicite dans nos bagages ou sur nous (euh... On ne l'avait pas déjà eu ce contrôle là à l'entrée du bâtiment??). Bon, quelques minutes plus tard, après le portique automatique, nous arrivons sur une nouvelle file d'attente (encore plus grande) qui mène au contrôle des douanes... Décidément !! Je me dis qu'avec une organisation pareille, beaucoup de personnes doivent arriver en retard pour leur embarquement (même nous, qui étions pourtant arrivés en avance, commençons à être un peu juste niveau horaire). Et en effet, depuis notre entrée dans le terminal, les haut-parleurs n'ont de cesse de hurler les noms de passagers en retard. Et il y en a beaucoup, et sur tous les vols !! Nous passons enfin les douanes (j'ai une pensée pour mon sac-à-dos qui est resté toute la nuit à l'aéroport. Normalement, il a été transféré automatiquement... Normalement...) et nous débouchons, sur une nouvelle file d'attente, menant à un nouveau contrôle !!! Mais il y en a combien ???? En plus, là, on commence à être en retard ! Bon, au final, nous arrivons à notre porte d'embarquement, passons un contrôle de plus et embarquons dans le bus qui nous conduit jusqu'à l'avion. En sortant du bus, je vous le donne en mille, un nouveau contrôle au pied de l'escalier qui monte dans l'avion !! Bon, je ne vois plus aucune raison de s'étonner... Et enfin, un dernier contrôle en entrant dans l'appareil. Si on fait le compte, en tout, nous avons dû passer 8 contrôles entre l'entrée de l'aéroport et l'avion ! On s'attendrait presque à voir débouler un vieux mage en haillons et qui gueulerait « vous ne passerez paaaaaaas!!!! »... Avec ça, si t'es un terroriste, t'as aucune chance !! On dirait presque que la sécurité de l'aéroport s'est inspiré d'un jeu vidéo en faisant des niveaux pour progresser... C'est Mario qui serait fier.

 

Enfin, dans l'avion !! Je me sépare de Karl qui a son siège à l'autre bout de l'appareil. Les dix heures de vol qui suivront, elles, se passeront dans une normalité ennuyante, entre les deux films proposés par la compagnie et ma voisine de siège pas franchement bavarde mais qui n'a visiblement pas de mal à dormir la tête sur mon épaule, le voyage me paraîtra bien long et fade. Mais nous y voilà enfin ! L'avion atterri ! Je sors tout content de l'appareil, et là : contrôle de passeports ! Non mais c'est pas un peu fini là ?! ... Bon ok, j'avoue, là c'est normal.

 

Je retrouve Karl à la livraison des bagages. Nous sommes un peu tendus car ça fait plus de 24 heures que nous n'avons pas vu nos sacs-à-dos et nous espérons qu'ils ont bien suivis. Finalement les voilà, le mien dégage quelques effluves laitières du fait des fromages qu'il contient (oui, les gens chez qui je me rends ce soir et qui vont m'héberger durant mon week-end à São Paulo m'ont demandé de leur en ramener), mmmmh !! Ca sent bon la France... Et mes fringues aussi du coup.

 

A la sortie de l'aéroport, je quitte Karl, qui prend un bus différent du mien et j'embarque dans un bus très confortable direction le quartier des affaires, où je dois retrouver mes hôtes.

 

Le voyage fut long, mais je suis finalement bien arrivé ! Je m'apprête à vivre trois mois en Amérique du sud, que j'espère riches en rencontres, expériences et moments extraordinaires ! Comme je le dis toujours : On the road again !

 

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Vibrations brésiliennes

 

"Vamos a bailar !!"

Comment ? C'est pas de l'espagnol au Brésil mais du portuguais ?

mais je fais comment pour communiquer moi ?

 

 

Me voici arrivé chez mes hôtes, Cadu et Federica (Fede pour faire court). Le premier est Brésilien, natif de São Paulo et la deuxième est italienne. Ils sont un couple approchant la quarantaine et vivent sur l'avenue Paulista, le quartier riche et commercial de la ville. Toutes les grosses entreprises de la région ont leurs sièges dans cette avenue de plus de deux kilomètres de long qui est l'un des carrefours de cette ville de plus de 20 millions d'habitants, la plus grande du Brésil. 

 

Grande. Le mot est bien choisi, dans le bus qui m'amène de l'aéroport au centre-ville, il y a des immeubles à perte de vue. Point de centre avec sa concentration de gratte-ciels. Ici, les buildings sont omniprésents et étendus sur toute la ville !! C'est dans la gueule de ce géant, plus grande ville du pays loin devant Rio de Janeiro (12 millions d'habitants « seulement ») que je commence mon voyage.

 

Mais revenons à mes hôtes. J'arrive chez Cadu et Fede vers 23:30. Je suis chaleureusement accueilli et ils me mettent de suite à l'aise. Je suis logé royalement, avec une chambre et une salle de bain pour mon usage personnel ! Ils se mettent à table et nous commençons les présentations. Cadu et Fede parlent très bien français puisqu'ils ont vécus neuf ans à Paris. Lui est architecte, elle est responsable de magasin. Ces gens ont pas mal voyagé, ils ont fait un voyage d'un an en Europe et en Asie. Cela nous fait un bon sujet de conversation. Enfin, c'est pas le tout, mais après presque deux jours de voyage, c'est l'heure d'aller dormir. Demain, l'exploration commence !!

 

Premier jour à São Paulo !! Après le petit déjeuner, Fede part travailler et Cadu m'emmène en ville. Il fait chaud et lourd, les effluves de gasoil chaud se mélangeant aux odeurs des arbres me font l'effet d'une madeleine de Proust et me renvoient en Australie. Cette sensation de liberté et de bonheur que j'avais si fortement ressentie il y a trois ans à l'autre bout du monde me revient à l'identique. Le quartier voisin de celui de Cadu et Fede est plutôt riche et très vert. Il y a des arbres partout, des arbres magnifiques et très touffus, aux fleurs et feuilles que je n'avais jamais vu avant.

 

Sur la route, Cadu me parle beaucoup de sa ville et de son pays. En bon architecte, il connaît les dates de construction de chaque bâtiment et leurs histoires, et il aime partager sa passion ! Nous prenons le métro pour nous rendre en centre-ville. Je me laisse guider par Cadu et je découvre avec émerveillement la vie et l'ambiance des villes brésiliennes. La première chose qui saute au yeux, ce sont les tenues vestimentaires. Cela peut paraître très cliché, mais les filles comme les garçons sont vraiment peu vêtus, de manière parfois carrément aguichante. Pour faire court : Oui ! Les brésiliennes sont super-sexy !! (les mecs, je m'en fout...).

 

La deuxième chose qui saute aux yeux (et c'est ce qui m'a particulièrement enchanté ici) c'est l'omniprésence de la musique dans les rues. Il y a toujours quelqu'un avec une enceinte quelque part qui diffuse de la musique. Ça rend la ville extrêmement vivante !! De plus, une multitude de vendeurs à la sauvette se bousculent sur certains trottoirs et vendent casquettes, lunettes, bouteilles d'eau (ça c'est vachement bien!), perches pour selfies et autres gadgets en tous genres. Les rues sont très animées, il y a de la vie et des sourires partout !

 

Évidemment, il y a un « mais ». Beaucoup de sans-abris dorment ou comatent à même le sol. Certains d'entre eux sont bourrés et déambulent de traviole dans les rues sans but apparent, d'autres, un peu moins bourrés (ou camés) quémandent de l'argent... Mais le plus inquiétant ici, c'est leur nombre. Des sans-abris, qu'ils soient dans un état second ou pas, j'en ai vu pas mal en Asie, et chacun d'entre eux en est un de trop. Mais ici, il y en a vraiment beaucoup et partout. C'est un triste spectacle qui se mélange bizarrement aux sourires et à la joie de vivre ambiante. D'après Cadu, les sans-abris que l'on peut voir en centre-ville ne sont que la face visible de l'iceberg. Plus de deux millions de personnes vivraient dans des favelas rien que sur São Paulo, soit plus de 10% de la population de la ville... Ce seul chiffre fait frémir...

Cadu m'emmène jusqu'au marché couvert municipal, dont j'avais entendu dire que c'était quelque chose à voir. Et effectivement, il y a une effervescence et une ambiance peu commune ici. Au début, ce sont les stands de fruits et légumes qui règnent en maître. Il y a là un grand nombre de fruits que je n'avais jamais vu, d'autres, tel que le dragonfruit, que je n'avais vu qu'en Asie. A chaque stand, une armée de vendeurs en uniformes nous accostent pour nous vendre quelque chose. Certains font goûter leurs produits. Je suis plutôt surpris de voir qu'une fois passé les fruits et légumes, mis à part les petites gargottes pour manger, on trouve principalement des stands de fromage et de charcuterie. J'ai pu en goûter un ou deux... En toute objectivité, je préfère les fromage français ! D'ailleurs, Cadu me fait remarquer que beaucoup de produits sont inspirés (voire carrément copié) de produits originaires d'Europe. Ainsi, on trouve assez souvent des fromages étiquetés « typo feta » ou « typo mozzarella » et autres.

 

Mais intéressons-nous plutôt aux produit locaux. Mon guide du jour me désigne ce qui ressemble à un saucisson ridiculement énorme. Voici donc la fameuse mortadelle (bon, ok, il paraît qu'on en trouve en France... mais moi je connaissais pas). Plus qu'un aliment typiquement brésilien, c'est surtout sa popularité et son usage (excessif à mon goût) dans les sandwichs qui en font une des stars du marché. Justement, on a faim, essayons donc ce fameux sandwich ! Nous nous arrêtons à un bar (et les places sont chères, même debout au comptoir) pour boire un verre (ah bah oui ! Faut pas non plus oublier l'apéro hein!). Quand je vois le gabarit du sandwich de la dame d'à côté, et quand je vois le gabarit de la dame en question, je me dit que c'est vraiment déraisonnable, et nous décidons de ne prendre qu'un sandwich pour deux. De base, le sandwich est basique, même s'il déborde de partout, mais la quantité de viande séchée, de mortadelle, de jambon ou autre charcuterie le fait gonfler jusqu'à atteinte une taille de l'espace !! Bon allez, on se dégonfle pas, bon appétit !! Quand tu croques dans un machin comme ça (bon déjà, ta bouche n'est pas assez grande), tu retapisses le bar ! Tu en mets partout, ça dégouline d'huile, de fromage fondu, de sauce tomate et j'en passe !! Mais pour le coup, la taille réduit très vite et ça devient tout de suite beaucoup plus facile à manger (c'est peut-être ça le secret d'ailleurs). N'empêche qu'après avoir fini, et j’entends par là avoir récupéré les morceaux de ton sandwich un peu partout, tu ne peux plus rien, mais alors plus RIEN avaler !! Nous repartons en tenant nos ventres, de peur qu'ils ne tombent par terre après un repas si copieux. Hein ? Moi j'exagère ? Vous trouvez? 

 

Nous quittons le marché pour continuer notre balade en centre-ville. Devant la cathédrale, de nombreux sans-abris dorment à même le sol. Un homme pas loin hurle et s'agite dans tous les sens en haranguant (engueulant?) les quelques passants qui veulent bien s'arrêter, la bible dans la main. Dans un pays où la grande majorité des gens sont chrétiens, l'ironie du sort amène les plus démunis à traîner leur misère devant la maison de dieu, priant pour des jours meilleurs qui ne viennent pas toujours. Dans ces conditions, il est assez difficile de comprendre pourquoi le cœur de São Paulo a tant de bâtiments laissés à l'abandon, lorsqu'ils pourraient servir d'abris à ceux qui vivent dehors et qui essuient le froid en hiver et la pluie en été.

 

Après une petite bière sur une terrasse au son des musicos du coin, nous passons rapidement acheter mon billet de bus pour Foz do Iguaçu et nous rentrons à l'appart.

 Fede et Cadu sont invités chez des amis ce soir et me proposent de venir avec eux. Au menu, Vodka et film d'horreur... Tout ce que j'aime... Mais bon. Nous nous rendons donc dans un appartement immense, luxueux et super high-tech. J'aimerais bien avoir le même. Nous sommes accueillis par la propriétaire, une charmante jeune femme (malheureusement non célibataire) et rejoins par un de ses amis. Nous nous mettons à table, ce soir c'est vin rouge et hot-dogs (de luxe) faits maison ! L'ami-de-la-proprio-dont-je-ne-me-souviens-plus-le-nom (on va l'appeler Ricardo) est gay et explose tous les clichés du gars efféminé et maniéré. C'est simple, les charmantes demoiselles assises autour de la table passent presque pour des bonhommes à côté. La soirée se passe et après le repas, c'est l'heure de l'apéro (qui a dit que c'était avant?) et quelques instants plus tard, le moment que je redoutais tant est arrivé. C'est le moment de regarder un film d'horreur !!! Je répondais un joyeux « okay cool » tandis que mon moi intérieur m'ordonnait de m'échapper en sautant par la fenêtre. Nous nous installons dans nos fauteuils muni de pop-corn (ah y'a du pop-corn ? C'est cool ça) et de nos cocktails vodka-banane-canelle pour les gens nés un jour impair et une sorte de Campari hyper-amer pour ceux nés un jour pair. Je suis né un 22... Ricardo, lui, enchaîne les vodkas-orange en trinquant à chaque gorgée d'un « cheers-clin d'oeil » avec la personne la plus proche. Bref, le moment tant redouté approche. Télécommande en main, notre hôte fait défiler sur son écran géant les films d'horreur de son répertoire, tous illustrés par une affiche plus répugnante et flippante que la précédente. A ce moment précis, tout ce que je souhaite c'est vider mon verre de Campari sur le tableau électrique de l'appart pour sauver mon cœur sensible d'un désastre émotionnel. Le suspens dure. Les affiches défilent. L'attente est intenable, Ricardo enchaîne toujours les vodkas-orange avec toujours plus de « cheers-clin d'oeil » dont je suis devenu la cible principale puisqu'il semble s'être définitivement installé dans le fauteuil voisin du mien. C'est un film d'horreur avant le film d'horreur. Je transpire à grosse gouttes. Le danger est à présent partout et la tension est palpable.

 

Et finalement, sans que je comprenne vraiment pourquoi, le choix se porte sur un film de Tarantino, « Le boulevard de la mort ». Mais c'est pas un film d'horreur ça ! dis-je. Tu veux qu'on mette « la pucelle violée par le diable à trois bites » ? Euh... Non, non, « le boulevard de la mort » c'est très bien...

 

Je n'en reviens pas d'avoir échappé à la séance horreur de ce soir !! Fede est également soulagée, ce n'est pas non plus sa tasse de thé. Enfin, nous regardons donc le boulevard des bisounours (enfin, de la mort mais bon, après les films que je m'étais fait dans ma tête, j'ai l'impression de regarder les télétubies). La soirée se passe donc merveilleusement bien, dans le fauteuil, avec du pop-corn et un petit verre (j'ai changé entre-temps, j'ai refilé mon Campari à Fede).

 

Cependant, Ricardo n'a plus d'yeux que pour moi et me sert cocktail sur cocktail en se rapprochant un peu trop à mon goût. Les « cheers-clins d’œil » à répétitions se transforment en « cheers-clins d’œil-petite caresse sur le bras » et je commence à me sentir mal à l'aise. Après le film, Ricardo se met en tête de nous chanter la liste des 20 derniers gagnants des NRJ music awards. Il chante plutôt faux mais il y met plus d'ardeur que Lara Fabian ! A chaque chanson il me prend dans ses bras et là, c'est le signal qu'il est temps de rentrer !! Nous partons donc vers 4h30, ramenons Ricardo qui n'a plus trop l'air de savoir où il habite et rentrons ensuite chez Cadu et Fede. La soirée aura été riche en émotions mais c'était bien marrant !

 

Le lendemain, après que Fede soit partie travailler, Cadu m'emmène au parc Ibirapuera. On est dimanche et tous les jeunes de la ville se sont donné rendez-vous là-bas pour s'adonner à leurs loisirs favoris. Et malgré ce qu'on pourrait penser, ce n'est pas la danse qui règne en maître en ces lieux mais le skateboard, dont les paulistanos sont de grands adeptes ! Bien entendu, le parc est également un endroit où l'on peut voir d'autres activités. On y trouve entre autres des joggeurs, des acrobates, des fans de Cosplay (mode de déguisement japonais), des danseurs etc... Ce parc diffuse une atmosphère très reposante et venir y passer la journée ou la demie-journée doit être très reposant. Les bruits de la ville sont étouffés par les arbres, l'air y est moins saturé que dans le reste de São Paulo et seuls les gens heureux semble venir s'y retrouver.

 

Nous irons manger des Pastels à midi. Une autre spécialité du coin. Ce sont des sortes de ravioles frites, fourrées avec un ou plusieurs ingrédients. Nous en prenons à la viande, au fromage et au cœurs de palmiers. Les trois sont délicieux et je savoure le plaisir de découvrir quelque chose de nouveau, comme à chaque fois, en plus de passer un bon moment avec mon hôte qui ne tarit pas d'informations à me donner sur sa ville et son pays.

 

Tous les dimanches, dans la journée, L'avenue Paulista, où vivent Cadu et Fede, se transforme en rue pietonne, accueillant des artistes de tous horizons. En me baladant, je croiserais ainsi la route d'un Elvis Presley en détresse avec son système de son portatif qui ne semble pas trop aimer le rock, d'un Captain América plus petit et plus gros que son homologue américain et autres musicos. Les sourires se mélangent aux regards curieux et les danseurs aux musiciens. Quelques jeunes se prennent en photo sur une grille d'aération faisant voler les robes et les cheveux, d'autres s'initient à l'art du hoola-hoop avec des cerceaux mis à disposition. Demain je prendrais le bus en direction de Foz do Iguaçu, dans le sud du pays, après avoir chaleureusement remercié Cadu et Fede qui furent des hôtes merveilleux à tout point de vue et qui m'auront permis de débuter ce voyage de la meilleure des façons. Pour le moment, je profite du bonheur ambiant des rues de São Paulo. Tout le monde semble heureux, tout est parfait.

        3         Les chutes d'Iguaçu

 

... wow

 

J'embarque dans le bus qui m'emmènera jusqu'aux fameuses chutes d'Iguaçu ! Le trajet est d'environ 14 heures et je prends donc un bus de nuit. Malgré le fait que je ne soit pas spécialement fan de ce type de transports, je m'étais fait à l'idée qu'en Amérique latine, j'allais bouffer du bus ! Ceci dit, je n'ai entendu que du bien au sujet de ces véhicules qui sont apparemment d'un confort sans égal dans toute la galaxie (ouais, carrément!!). Il y a différents standards de confort. On peut trouver des bus classiques, des bus dits « conventional » ou « semi-cama » dans lesquels les sièges sont très confortables et s'inclinent à 45° pour pouvoir dormir et le haut de gamme, dit « cama », où là, le siège se transforme carrément en lit pour passer un trajet au pays des rêves. Celui que je prend ce soir est un semi-cama. À première vue, les sièges sont tout ce qu'il y a de plus classique et laissent peu de place pour les jambes, mais une fois que le siège est incliné, on se sent beaucoup plus à l'aise. Un autre voyageur s'installe à côté de moi. Il s'appelle Andrea, est italien et voyage également seul avec son sac-à-dos. Nous quittons São Paulo. L'arrivée à Foz Do Iguaçu est prévue demain matin à neuf heures.

 

 

La pluie nous accompagnera quasiment toute la nuit et je m'inquiète un peu du temps qu'il fera à Iguaçu. Le soleil se lève vers six heures du matin et moi avec. À ma grande surprise, j'ai relativement bien dormi dans ce bus et je ne me sent pas fatigué, même si j'ai bien supporté le sac de couchage à cause de la clim, un peu trop forte à mon goût. Je découvre les paysages du Brésil, verts à souhaits, les arbres tropicaux se mélangent aux conifères et donnent d'étranges allures aux forêts. Je se sais pas trop si je vais voir Tarzan se balader de liane en liane ou si je dois m'attendre à voir surgir le père noël et son traîneau de derrière un sapin ! Mais le paysage est vraiment magnifique ! Et cerise sur le gâteau, le ciel se découvre au fur et à mesure de notre avancée !

 

Nous arrivons finalement à Foz Do Iguazu vers onze heures après un trajet finalement agréable. Les 14 heures sont bien passées. À la station de bus, après avoir récupéré nos sacs, Andréa et moi décidons d'aller voir les chutes dès cet après-midi. Le parc d'Iguaçu est divisé en deux puisque le Rio Parana, le fleuve abritant les fameuses précipitations d'eau, fait office de frontière entre le Brésil et l'Argentine. Chaque pays est donc « propriétaire » d'un côté. Notre côté est apparemment rapide à visiter et peux se faire en une demi-journée.

 

Nous partons donc à la recherche de quelque chose à manger et d'un distributeur, aucun restaurant ne prenant la carte bleue. Bizarre... Mais encore plus étrange, impossible de trouver une banque !! Nous apprenons par les locaux qu'il n'y en a que deux dans toute la ville ! Ouate ?? Bon. Après une demi-heure de marche pour retirer quelques réals, nous pouvons enfin passer à table !

 

 

Il est déjà 14h !! Bon, faut se magner maintenant ! Nous prenons le bus direction le parc national d'Iguaçu ! Après 3/4 d'heure de route, nous sommes arrivés. L'excitation monte !! Le coté brésilien des chutes d'Iguaçu est structuré comme un parc d'attraction. Après les guichets à l'entrée pour prendre un billet et un petit plan des lieux, nous devons prendre un bus qui fait la navette entre les différents points de départ des visites. Il est en outre possible de faire des randonnées à pieds ou à vélo, de faire du bateau ou du rafting, chacune des activités pré-citée étant payante, en plus du prix d'entrée. La seule chose qui nous est accessible sans avoir à payer de nouveau est la balade d'un kilomètre et demi qui longe le rio et ses fameuses chutes d'eau. C'est tout ce qui nous intéresse ! Nous descendons donc avec la plupart des touristes au début d'un petit chemin bétonné à travers la forêt. Nous croisons de suite des coatis, ces petits animaux qui ressemblent à des ratons-laveurs au long nez pointus. Ils sont très mignons et feu farouche mais il est bien indiqué de ne pas trop s'en approcher ni de leur donner à manger car il peuvent mordre. Nous descendons le long du chemin et nous finissons par déboucher sur une plate-forme de laquelle part un chemin qui longe le fleuve. C'est le premier endroit qui nous permet de voir les chutes. Un paysage fantastique se dresse devant nous, une jungle à perte de vue avec, au premier plan, des chutes d'eau de plusieurs dizaines de mètres de haut sur beaucoup plus de large !! C'est un spectacle grandiose qui s'offre à nos yeux !! Nous restons scotchés plusieurs minutes devant tant de beauté ! Après nous être remis de ce premier choc, nous continuons la route. Plus nous avançons, plus les chutes semblent grandes et proches de nous, le bruit se fait de plus en plus fort et on commence à apercevoir la brume produite par le fracas des eaux qui viennent se briser tout en bas. Le chemin continue toujours, les coatis se font plus rares, il faut croire qu'ils n'aiment pas l'humidité. À chaque virage, c'est une nouvelle scène qui nous est offerte. Au détour de chaque arbre nous avons un nouveau point de vue sur cette merveille de la nature.

 

Finalement, au bout d'une demi-heure de promenade, nous entrapercevons le bout de la balade. Une passerelle en bois passe carrément au pied d'une des plus grandes chute !! La bruine dégagée par le choc est telle que les gens qui en reviennent sont trempés de la tête aux pieds. L'eau s'écrase avec une telle force qu'elle crée un vent qui ébourifferait un chauve ! La bruine combinée au souffle, c'est une véritable douche qui nous attends !!! Je range mon appareil photo, pas très ami avec la flotte, et c'est parti ! Nous nous avançons sur la passerelle, l'air se fait ressentir et très vite, les premières gouttes nous parviennent. Nous arrivons à mi-chemin. Nous sommes maintenant face à la chute, à quelques mètres seulement de ces tonnes d'eau qui s'écrasent sous notre nez dans un tonnerre assourdissant !! Je me sens si petit... la puissance dégagée par cette nature si sauvage me file presque la chair de poule. Tout mon être semble se recueillir devant cette « entité » qui semble gronder sa supériorité aux hommes, comme pour nous rappeler que nous ne sommes rien à côté d'elle. Mon corps ressent l'humilité de sa petitesse mais mon cœur exulte le bonheur profond et le privilège d'être aux premières loges de ce spectacle hallucinant !!

 

A peine avons-nous le temps de reprendre nos esprits, embrumés par les flots du fleuve, que nous sommes déjà trempés de la tête aux pieds !! La douche brésilienne !! Nous allons jusqu'au bout de la passerelle pour nous retrouver devant un nouveau spectacle de taille. Sous nos pieds, l'eau accélère et se jette à nouveau dans le vide, entraînant avec elle quiconque porte son regard vers le bas. Par réflexe je me cramponne à la rambarde, comme si j'allais être aspiré par le rio dans sa chute vertigineuse, vingts mètres plus bas. L'effet est saisissant et enivrant. Devant nous, le vide, derrière nous, une puissance écrasante !

 

Je manque de qualificatifs pour décrire tout ce que j'ai pu ressentir à ce moment-là, mais une chose est sûre, je ne pourrais jamais oublier une seule seconde de ce moment ! C'est une expérience à vivre une fois dans sa vie ! Andréa est aux anges également, allant jusqu'à dire qu'à côté, les chutes du Niagara, qu'il a déjà vu, sont ridicules.

 

Un peu plus loin, un escalier nous emmène sur une plate-forme surplombant l'ensemble des chute. Nous prenons quelques dernières photos avec un papillon très amical qui semble ne plus vouloir me quitter et il est malheureusement déjà l'heure de partir. Je serais bien resté toute la nuit si j'avais pu mais je veux traverser la frontière ce soir et le dernier bus qui y va part à 19h et je dois encore aller récupérer mon sac que j'ai laissé à l'hôtel d'Andrea ce midi. C'est donc à contrecœur que nous quittons ce lieu d'une rare beauté, trempés, mais heureux au possible !

 

Je passe la frontière le soir-même après avoir dis au revoir à mon compagnon de la journée. Pour l'anecdote, c'est la première fois que je passe une frontière à pied ! Bon, ok on s'en fout.

 

J'arrive vers 20h à la ville frontalière argentine, Puerto Iguazu (oui, en argentine ils l'écrivent avec un z). Je retrouve avec plaisir l'espagnol qui m'avait un peu manqué pendant ces quelques jours au Brésil. J'avais l'impression d'avoir perdu la faculté de lire. Je passerai la nuit dans une auberge un peu miteuse mais dans laquelle je rencontrerai un chilien un peu timbré sur les bords avec qui je passerai la soirée. Je ne comprend pas un quart de ce qu'il me dit !! Je pense que j'ai besoin d'un peu de temps pour me réhabituer à l'espagnol. Ou alors c'est lui qui parle trop vite, je sais pas trop... Ou peut-être les deux à la fois.

 

Mais au final je pense que c'est mon esprit qui est resté de l'autre côté de la frontière, pas très loin, juste quelques kilomètres à vol d'oiseau, mais à des années lumières de la réalité.

 

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Commentaires: 6
  • #1

    The father (dimanche, 10 janvier 2016 16:52)

    C'est reparti pour un tour. Je serai très attentif et assidu à tes compte-rendus qui sont toujours aussi agréable à lire . Profite mon fils.

  • #2

    mum (lundi, 11 janvier 2016 08:42)

    Je retrouve bien là ton style littéraire, toujours sur le fil du rire…
    Pour nous aussi c'est parti, pour un nouveau voyage à travers tes yeux et le regard qu'ils portent sur le monde. Je suivrai avec impatience, de mon monde à moi, si immobile. Au plaisir de te lire, mille baisers…

  • #3

    Isabelle (samedi, 16 janvier 2016 15:32)

    Très heureuse de te lire à nouveau,c'est toujours un régal de partager tes aventures! J'espère que tu tombera sur des gens aussi sympathique tout au long de ton parcours pour te guider dans les visites. Apporte nous un peu de chaleur ça fait du bien, ici c'est froid! Bisous de Pat,tomtom et nana qui sont la aussi

  • #4

    MUM (lundi, 18 janvier 2016 13:33)

    Coucou (oui, moi je n'écris que le lundi !) Très drôle ta soirée Oeil-de-velouuuurs/Martini-trash ! c'est chaud le Brazil…
    Ça fait du bien de voir des gens en tong, nous ça fait longtemps que l'on en a pas vu… vite, encore ! des bisoux from les Frrrroides Pyrénées

  • #5

    Charlotte (samedi, 30 janvier 2016 16:55)

    Hello Ulysse, on s'y croirait, merci de nous faire partager tes voyages de facon si reelle, si "dans le moment". Tres impressionantes le chutes! Bisou

  • #6

    mum (lundi, 01 février 2016 13:12)

    C'est lundi, donc j'écris… Wouaw ! ben moi j'étais trempée comme une soupe à mon bureau, à lire tes aventures en chutes libres ! j'en avais les oreilles bourdonnantes. L'écran de mon ordi est tout couvert de buée ! J'imagine ce que ce spectacle a pu graver dans ta mémoire…
    Des bisoux, hâte à la suite !